Comment la France peut-elle agir sur la situation internationale en matière d’accès à l’eau et l’assainissement ?

La France a un rôle essentiel dans le soutien de la mise en œuvre du droit humain à l’eau et à l’assainissement au travers de son Aide Publique au Développement (APD).

Atteindre une Aide Publique au Développement de 0,55% du Revenu National Brut (RNB) en 2022, puis 0,7 % en 2025

L’engagement historique de la France d’affecter 0,7% du RNB à l’APD est encore loin d‘être atteint (0,43% en 2018). Le Président de la République s’est engagé à augmenter l’APD pour atteindre 0,55% du RNB en 2022. Cet engagement, maintes fois répété, doit être traduit en programmation budgétaire dans la Loi d’Orientation et de Programmation sur le Développement solidaire et la lutte contre les inégalités mondiales, dont le passage à l’Assemblée Nationale doit cesser d’être reporté par le gouvernement.

Rééquilibrer l’APD française entre prêts et dons en faveur de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement

Le secteur de l’eau et l’assainissement est un secteur particulièrement touché par le déséquilibre prêts/dons dans l’APD bilatérale française : 90% de l’aide se réalise sous forme de prêts. Les engagements de dons bilatéraux annuels pour l’eau et l’assainissement sont de seulement 60 millions d’euros en moyenne, comprenant les aides de l’Etat et la coopération décentralisée. Pourtant, s’il est effectivement possible de financer certaines interventions sur prêts (en particulier les systèmes d’eau à grande échelle en milieu urbain), les dons sont indispensables pour assurer l’accès aux services essentiels pour les populations les plus pauvres, dans les pays peu solvables ou en crise. Ils sont également indispensables pour financer l’accès à l’assainissement, l’appui à l’amélioration de la gouvernance et l’appui institutionnel, nécessaires à la durabilité de l’action. Afin de réorienter l’aide vers ces enjeux prioritaires et au regard de la trajectoire ascendante de l’APD, la France doit tendre vers un équilibre entre prêts et dons dans le secteur et atteindre 400 millions d’euros de dons bilatéraux par an.

Améliorer l’efficacité de l’aide et le ciblage prioritaire vers les plus vulnérables

L’aide doit être ciblée en priorité vers les régions et les populations qui sont les plus impactées par le manque d’accès à l’eau et à l’assainissement. La France devrait ainsi dédier 50% de l’APD aux Pays les Moins Avancés (liste OCDE) et cibler les populations les plus vulnérables, pour « ne laisser personne de côté », grâce à des critères clairs (taux de pauvreté, indicateurs de santé, taux de sous-nutrition, taux d’accès à l’eau et à l’assainissement, habitat formel ou non formel, etc.).

La France doit également respecter ses engagements d’augmenter le montant de l’aide humanitaire d’urgence (500 millions d’euros à l’horizon 2022). Une meilleure prise en compte des crises, dont la fréquence et l’intensité augmentent avec le dérèglement climatique, est nécessaire. Lors des catastrophes naturelles et conflits, il est essentiel de répondre aux besoins fondamentaux des populations en garantissant un accès immédiat à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène.

Enfin, l’Etat doit augmenter la part de l’aide transitant par les ONG afin d’atteindre la moyenne des pays donateurs. Actuellement, la part de l’aide transitant par les ONG (tous secteurs confondus) est de 3%, bien loin de la moyenne de 12 % des pays bailleurs de l’OCDE.

Assurer un portage politique fort et un suivi transparent de la nouvelle stratégie internationale de la France pour l’eau et l’assainissement

La France s’est dotée d’une nouvelle stratégie internationale pour l’eau et l’assainissement en 2019 (stratégie pour 2020-2030). Il est primordial d’assurer une bonne application de la stratégie en assurant un portage politique fort et des moyens de mise en œuvre adéquats (notamment via l’Aide Publique au Développement). La stratégie doit faire l’objet d’un processus de suivi robuste et transparent, associant la société civile.